ENS LSH - Colloque - Pour une histoire critique et citoyenne, le cas de l’histoire franco-algérienne

Pour une histoire critique et citoyenne
Le cas de l’histoire franco-algérienne

20, 21, 22 juin 2006


RUF Werner

Université de Kassel (Allemagne)

Justice et mémoire : continuités de l’antagonisme entre État et peuple en Algérie

Session thématique « Du beylik ottoman au pouvoir français »

Mardi 20 juin 2006 - Matin - 9h45-11h45 - Amphithéâtre

Résumé de la communication

Sans mémoire il ne peut y avoir légitimité. C’est ainsi que la mémoire, c’est-à-dire la construction de l’histoire, est continuellement sujette à des luttes politiques [1]. Ce débat continuel, s’il peut avoir lieu, a besoin d’un système démocratique ouvert et pluraliste. Dans ce cas il y a concurrence, voire lutte autour de cette construction du « nous » qui est le résultat de la construction de mémoire.

En Algérie indépendante, la prise « réelle » du pouvoir par l’armée des frontières et la mise en place d’un système de parti unique, dominé de fait par l’Armée de libération nationale - ALN -, a eu pour conséquence la création partisane d’une histoire qui ne tenait pas compte notamment :
-  de l’histoire complexe de l’Algérie,
-  du multiculturalisme de l’Algérie,
-  des contradictions du colonialisme français,
-  des forces et courants différents qui ont formé le Front de libération nationale (FLN). Cela a eu pour conséquence qu’il fut impossible de « rendre justice » aux courants non-officiels qui font partie de la société algérienne.

L’argumentation de la communication traitera le terme « justice » dans sa double sémantique : 1) justice dans le sens moral de rendre justice à tous les acteurs sociaux et politiques de la société algérienne depuis le début de la colonisation ; 2) justice dans le sens juridique du terme. Seul un système démocratique qui connaît et respecte la division des pouvoirs est capable d’assurer que le droit soit appliqué de façon égale à tous les citoyens et citoyennes, et qu’une culture politique se développe dans laquelle la justice soit acceptée comme institution morale de la société.

C’est sous ces prémisses que les déficits du système algérien actuel seront analysés, notamment :
-  la construction d’une histoire unidimensionelle,
-  la construction de la « révolution algérienne » au détriment de la lutte pour l’indépendance,
-  la construction d’un « islam national » comme élément de cohésion de la société et ses contradictions,
-  le pluralisme de façade du système actuel,
-  le rôle de la justice comme instrument de répression et de reproduction du système actuel.

Ainsi, l’antagonisme qui - entre autres - existe entre l’État et le peuple provient du fait que ce n’est pas du peuple que provient, dans un débat libre, la production identitaire de la nation algérienne, mais d’un régime autoritaire qui non seulement occupe le pouvoir, mais aussi la production d’une mémoire qui est en flagrante contradiction avec la réalité - et le passé - vécus.

Publications

-  Die algerische Tragödie : Vom Zerbrechen des Staates einer zerrissenen Gesellschaft, Münster, agenda Verlag, 1997.

-  en collaboration avec Leveau Rémy, Migration und Staat. Inner und intergesellschaftliche Prozesse am Beispiel Algerien, Türkei, Deutschland und Frankreich. Internationale Politik und gesellschaftliche Entwicklung, Münster, Lit Verlag, 1991.

-  « Algier-Washington : Eine Beziehung der besonderen Art », INAMO, 35 (9), 2003, p. 19-22.

-  « Islam : a new challenge to the security of the western world ? », in Islam and the West. Judgements, Prejudices, Political Perspectives, W. Ruf (éd.), Münster, agenda Verlag, 2002, p. 41-54.

-  « Identität und Integration. Islamische Staatsbürger in Frankreich », in Blätter für deutsche und internationale Politik, Bonn, Blätter Verlagsgesellschaft mbH, 2002, numéro 5, p. 594-601.

-  « Algerischer Staatszerfall », in Blätter für deutsche und internationale Politik, Bonn, Blätter Verlagsgesellschaft mbH, 2001, numéro 8, p. 907-910.

Notes

[1] Voir par exemple les débats concernant les contenus des livres d’histoire, les commissions mixtes franco-allemandes, germano-polonaises, etc.



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