ENS LSH - Colloque - Pour une histoire critique et citoyenne, le cas de l’histoire franco-algérienne

Pour une histoire critique et citoyenne
Le cas de l’histoire franco-algérienne

20, 21, 22 juin 2006


AÏT EL DJOUDI Dalila

Université de Montpellier 3

L’Armée de libération nationale face à l’armée française

Session thématique « La guerre d’indépendance algérienne (1954-1962) »

Mercredi 21 juin 2006 - Après-midi - 14h00-16h00 - Salle F 106

L’Armée de libération nationale (ALN) s’est construite et a trouvé son identité dans l’hostilité à l’égard d’un ennemi clairement désigné. La construction de cette figure de l’ennemi, lisible à travers les représentations textuelles et imagées, semble être indispensable à la légitimation du combat mené par l’ALN. La guerre d’Algérie ne permet pas de proposer un aspect homogène quant au face à face des combattants. La diversité des expériences vécues défie tout manichéisme.

La confrontation de l’ALN face à l’armée française peut être abordée sous plusieurs angles de vue et niveaux de perception. Dans cette perspective, trois thèmes ont été retenus.

Tout d’abord l’ALN met les combattants français face à un conflit de devoirs, forme très courante du cas de conscience, qui résulte d’une impossibilité de satisfaire à une exigence morale sans en violer une autre.

Ensuite, le pragmatisme caractérise la réaction de l’ALN face aux actions de son adversaire. Celle-ci se dessine à l’image du prosaïsme des revendications et les méthodes employées par l’adversaire sont dénoncées. Les pratiques de l’armée française, bien avant de former la pierre angulaire de la mémoire des combattants de l’ALN, sont génératrices d’un choc traumatique. Elles constituent des empreintes, ancrées dans les paysages mentaux.

Enfin, l’un des aspects souvent occulté de cette confrontation entre les combattants français et algériens concerne la spécificité des prisonniers.

Le visage de l’ennemi

L’armée française est omniprésente en Algérie à partir de la fin de l’année 1955. Elle a porté la présence française jusqu’aux douars les plus reculés, dont certains restaient même souvent hors du cercle des visites de l’administrateur. Dans la personne du soldat du contingent et du rappelé, c’est la France elle-même qui est venue en Algérie, et non seulement une armée de métier comme celle qui s’est battue seule en Indochine, dans l’indifférence de la nation.

Très tôt, l’ALN donne à la guerre un sens psychologique et tente de faire prendre conscience aux soldats français des conséquences morales de leurs actes et d’une telle guerre. L’ALN invite les soldats français à un examen de conscience. Lorsque l’armée est engagée, l’honneur de la nation l’est aussi. Néanmoins, l’ALN précise qu’elle n’a aucune rancœur contre la France lorsqu’elle s’adresse aux soldats de l’armée française :

Soldats français, rentrez chez vous, nous ne sommes pas des agresseurs de votre pays que nous respectons. Les Algériens luttent pour la liberté. Ils n’ont pas de haine pour toi.[1]

Au début de la guerre, l’ALN tente d’atteindre les jeunes soldats du contingent en profitant du fait que l’armée française n’est pas encore adaptée à la contre-guérilla. L’ALN, ennemi invisible, tente de susciter la crainte auprès des jeunes appelés par des menaces et des tirs de harcèlement, la nuit, sur les postes français. Mais elle tente également de susciter des interrogations concernant l’enjeu de la lutte. Elle pose un cas de conscience chez des appelés à qui l’armée doit enseigner qui ils défendent et contre qui ils se battent, ce qui n’est pas toujours fait par les cadres. Les combattants français sont interpellés directement par cette question :

Une fois de plus nous désirons t’éclairer et te mettre en face de la vraie réalité. Où est ta jeunesse ? Tu l’as consacrée à des actes qui s’opposent à tes principes. Demande le mieux à ta conscience qui te donnera certainement une réponse suffisante.[2]

L’ALN tente donc de diviser l’armée et d’atteindre le moral des troupes adverses en leur donnant mauvaise conscience. La particularité de cette guerre, c’est que le but n’est plus le contrôle du territoire mais bien celui des populations. L’ALN joue sur cette ambiguïté : les soldats savent-ils qui ils défendent et pourquoi ? Est-ce qu’ils sont là pour protéger les intérêts des Français d’Algérie, gros propriétaires ou simples citadins qui méprisent la population musulmane, ou défendent-ils l’idée républicaine de la France ? Or, les combattants français à leur arrivée n’envisagent pas la relation colonisateur-colonisé, ni les conditions particulières des luttes qui se sont développées depuis 1945 en Algérie.

Le cas de conscience le plus important exploité par l’ALN concerne la désertion. Pour convaincre les combattants français, l’ALN leur explique d’abord comment procéder :

Voici comment vous y prendre, lorsque vous êtes en patrouille, restez à l’arrière, laissez vos camarades s’éloigner puis venez. Nous vous suivrons des yeux partout, parce que nous sommes présents partout.[3]

Illustration 1 : Tract ALN « Soldat de l’armée française » ; wilaya 5, zone 1, sans date.

Source : AV, SHAT, 1H 2588/2.

Ensuite elle tente de faire une liste de tous les arguments qui peuvent justifier la désertion. Parmi les thèmes les plus exploités, celui de la « quille » car l’attente de la libération est une des principales préoccupations des soldats français :

Camarades du 22e RIC. Vous qui êtes maintenus sous la contrainte. Vous qui savez qu’il n’y a plus d’espoir pour la quille. Vous qui ne voulez pas mourir d’une mort inutile. Vous qui voulez revoir votre fiancée. Venez avec votre arme vous rallier au FLN.[4]

La démoralisation de l’ennemi souligne le risque d’une mort inutile en montrant que les combattants français sont plus victimes que coupables. Évidemment l’ALN les rassure immédiatement car elle connaît les thèmes de la propagande ennemie et tente de mettre les soldats français en confiance en précisant qu’ils seront reçus en hommes et en amis, qu’ils seront bien traités, avec dignité et seront en sécurité :

Jeunes soldats, il existe une certaine propagande qui dit que nous sommes des sauvages et que s’il arrive à quelques-uns de déserter les rangs de l’armée française, ils seront égorgés. C’est faux. On vous a trompé [sic]. Des centaines de déserteurs sont venus aujourd’hui participer avec nous dans la lutte et si ces gens parmi qui on compte de nombreux Français d’origine et des légionnaires nous aident aujourd’hui c’est parce qu’ils savent que notre cause est juste et que le colonialisme ne vivra plus.[5]

Illustration 2 : Tract ALN « La quille », découvert entre Tiskert et Mechamich,
le 7 juin 1958.

Source : AV, SHAT, 1H 2588/2.

Soldats Français

Partout en France, à Paris, Lyon, Bordeaux, Cherbourg, Toulouse, Marseille, vos Papas, Mamans, frères et sœurs, vos fiancées, ont manifesté contre le fascisme. Ils réclament tous votre retour. Si vous restez avec Massu, vous ne reverrez plus jamais la France. Vite, désertez, désertez tous. Suivez le conseil de vos parents.[6]

Le déserteur qui apparaît comme un coupable aux yeux des militaires français est présenté par l’ALN comme une victime. La difficulté de choisir porte moins sur les valeurs, que sur les situations, surtout dans le cas du conflit de devoirs. En somme, la conscience des combattants ne sait comment adapter des exigences à la situation, qui semble réfractaire à l’éthique.

L’ALN sait précisément à qui elle s’adresse : à des jeunes qui souffrent de l’éloignement. Elle tente d’influencer leur jugement en s’attaquant à leurs faiblesses. Le fait d’être maintenu sous les drapeaux, loin de la métropole et de ses proches, constitue pour les hommes du contingent un malaise psychologique. Le soldat se plaint plus de ses conditions de vie que des opérations militaires. L’ALN exploite cette situation avec ses tracts afin de renforcer ce sentiment de solitude et d’éloignement. Les jeunes du contingent pour la plupart désapprouvent et ne comprennent pas ce rallongement du service national et sont de ce fait, plus vulnérables et sensibles aux appels de l’ALN. Certains de ces soldats sont contraints de subir leur sort passivement car ils agissent et obéissent non pas par conviction mais uniquement par crainte des autorités hiérarchiques.

L’ALN a compris qu’il fallait réagir en faisant prendre conscience à son adversaire des conséquences de ses actions. Ce contexte contribue à créer chez l’adversaire un climat d’insécurité permanent devenant, à la longue, paralysant.

L’Armée de libération nationale face aux actions de son adversaire

L’ALN revendique son bon droit et justifie ses violences par celles de l’adversaire. L’action de l’ALN envers son adversaire s’adapte aux circonstances en allant de la lutte non violente indirecte à la lutte armée directe, adoptant toutes les formes intermédiaires exigées par les situations particulières. Il faut savoir que l’ALN, pour s’imposer à l’ensemble du pays, use simultanément de trois moyens : la persuasion, l’organisation, mais aussi la « terreur ».

La mort de l’autre

L’ALN met en garde son adversaire de ne pas sous-estimer la violence du quotidien, à l’origine de nombreux ralliements dans ses rangs. Au contrôle des populations, s’ajoute la connaissance de proximité. L’une des particularités des militants de l’ALN est constituée par la sensibilité naturelle d’une population rurale qui vit de la solidarité et d’une information permanente sur qui fait quoi et où. L’ALN agit donc sur l’ennemi de manière à produire des effets diachroniquement développés : le démoraliser, le désendoctriner.

Les opérations menées par l’ALN sont de trois natures : embuscades, accrochages, coups de main. Lors de ces opérations, les attaques sont le fait de l’ALN et souvent l’ennemi est pris par surprise. Il n’y a pas de « front » clairement établi sauf sur les barrages frontaliers. Et donc il n’y a pas de délimitation topographique entre le territoire de la guerre et l’arrière réservé aux civils où l’ambiance est plus paisible. La mort est toujours présente, cas classique de guérilla.

Le fait de mettre un terme à la vie de l’autre quel qu’il soit n’est pas forcément interprété comme un acte glorieux. Ce basculement dans la violence est perçu comme une nécessité imposée par les événements. Cette perception inconsciente se répercute dans la vision de l’ennemi. La peur de la mort n’apparaît pas vraiment de ce côté puisqu’ils ne sont pas surpris par les attaques de l’adversaire, ce sont eux qui vont au combat. A contrario, les combattants français sont plus inquiets dans d’autres circonstances puisqu’ils sont victimes des attaques surprises qu’ils craignent beaucoup. Claire Mauss-Copeaux explique cette vision par le souvenir d’un rappelé :

Gérard, rappelé, dans les Aurès, décrit les effets de l’insécurité permanente : « À tout bout de champ, on s’attendait à [...]. C’est de ça que j’ai le plus souffert en Algérie, la peur d’avoir quelque chose qui vous tombe sur le poil, comme ça, là. [...] Je n’ai pas peur de le dire, j’ai eu peur. »[7]

La mort de l’adversaire est rarement évoquée dans les tracts, elle est utilisée pour accroître la crainte déjà présente chez les combattants français :

Vous ne trouvez que le fer et le feu. Chacun de vous qui vient nous opprimer se verra éliminé impitoyablement. Interroger la réalité et demandez-vous [sic] où sont passés les soldats qui vous ont devancés de France, d’Indochine, de l’OTAN, du Maroc, de Tunisie et du Sénégal ? Ils dorment de leurs derniers sommeils, laissant derrière eux des veuves et des fiancées éplorées ainsi que des orphelins. Pourquoi sont-ils morts ? Pour assurer pitance et bien-être aux colonialistes.[8]

L’ALN agite le spectre de la mort inévitable et injuste pour persuader les soldats français de déserter. Dans la wilaya 3 où nous avons recueilli les témoignages, a été découvert un tract adressé aux soldats français qui évoque la mort inutile de l’autre :

Vos frères qui meurent quotidiennement en grand nombre et qui sacrifient leurs vies, non pas au service de leur patrie, mais au profit des colons d’Algérie sont récompensés par Lacoste, mais toujours à titre posthume. Leurs médailles leur serviront de laissez-passer en enfer. Mais vous, pourquoi les y rejoindre ? Pourquoi ne pas abandonner l’Armée et son triste cortège de morts et de blessés... N’hésitez pas... Si vous vous obstinez à servir le gros et gras Robert Lacoste. Vos cadavres seront bientôt la proie de quelque chacal affamé dans un ravin du Djebel Algérien.[9]

L’ALN tente de convaincre les combattants français que leur mort est injuste.

Illustration 3 : Tract ALN « Vous vous battez pour des colonialistes », sans date.

Source : AV, SHAT, 1H 2588.

L’ALN compte sur l’impact émotionnel que peut susciter l’image de la mort auprès des combattants français. À l’instar de ce dessin, tel est le chemin emprunté par un soldat qui semble abattu et va tout droit à la mort. L’ALN appelle le soldat français à refuser d’être l’instrument de gros colons et de ceux qui remplissent leurs coffres-forts pendant que lui fait la guerre. Le même thème est utilisé afin de préciser que « la jeunesse française sert de chair à canon », avec ce dessin de Robert Lacoste[10] :

Illustration 4 : Tract ALN « La honte qui fume du “bleu” ».

Source : AV, SHAT 1H 2588.

Pour l’ALN, l’objectif de la lutte a été atteint, elle a un sens. L’ALN s’adresse symboliquement à une institution militaire qui ne cesse de se prétendre légitimée dans ses actions ou exactions en Algérie. Dans cette vision, l’honneur militaire est en jeu. Le soldat n’est pas seulement atteint dans sa chair mais aussi dans son psychisme. Les marques ou signifiants de la guerre d’Algérie se sont associés aux traces signifiantes de la construction de l’histoire coloniale. L’impact affectif organise ou désorganise le discours. Dans cette image, intervient le transfert de toutes les relations précédemment vécues. Celles-ci avec le temps sont exprimables, maîtrisables. Il y a un effet « reconstructeur » ou simplement réparateur des interprétations de l’autre. C’est pour rallier l’adversaire à son opinion que les forces en présence se livrent à des justifications concernant leur combat, nécessairement légitime. Chacun tente ainsi d’opérer une inversion du rapport de force en acquérant un statut plus favorable que l’autre.

Les réactions de l’Armée de libération nationale

L’ALN tente de tirer des bénéfices des maladresses et des exactions que commet l’armée française en exploitant la devise : « Les Français font eux-mêmes la meilleure propagande des rebelles. » Des directives sont données dans cette perspective :

Les services de presse (zones et régions) doivent être rapidement dotés d’appareils photos, si possible de caméras et ordre leur sera donné de photographier ou de filmer tous les villages bombardés, incendiés ou évacués se trouvant dans leurs secteurs ou régions. Les photos ou pellicules seront adressées au PC de la wilaya le 30 juin au plus tard.[11]

Des faits et documents nous sont toujours demandés par le commandement général sur les atrocités commises par les hordes barbares sur la répression ennemie : égorgement, incendie, viols, vols de bétail. Désormais, tous les actes de sauvagerie, toutes les atrocités et exactions commises par l’ennemi, feront l’objet d’un rapport accompagné de photographies, montrant le caractère odieux et lâche de la répression ennemie.[12]

L’utilisation des photographies par l’ALN à des fins de propagande montre bien le souci de convaincre l’opinion internationale. On retrouve la volonté de donner une image positive du combat mené.

Lorsque les unités françaises se comportaient de manière relativement digne, il n’y avait pas de représailles. Au contraire, les exactions envers les populations entraînaient une réaction violente.

Les actes de mauvais traitement ou les humiliations infligées par les combattants français contribuent à entretenir un esprit de vengeance notamment lorsque l’adversaire adopte un comportement irrespectueux en exposant sur la place publique les cadavres des principaux chefs de l’ALN comme dans le cas du commandant Mira[13] tué au combat le 6 novembre 1959, au nord d’Akbou.

La réaction de l’ALN est plus ou moins vindicative devant l’action menée par son adversaire, mais les considérations politiques ne sont jamais absentes des actions menées.

Néanmoins, certaines notes tentent de limiter la violence des règlements de compte, ce qui laisse supposer des dérives, d’où l’attitude à adopter envers l’ennemi :

Les moyens perfides ou barbares y sont proscrits et en un mot tout ce qui aggrave les souffrances sans influence directe sur l’issue de la lutte. Le combattant doit s’abstenir de toute violence contre les personnes (les violences et les viols sont punis sévèrement). Le combattant doit se souvenir qu’il a lui aussi des parents, des sœurs, des jeunes frères, des enfants et une épouse.[14]

Peu de temps avant l’élaboration de cette note, un courrier interne entre responsables de l’ALN évoquait déjà leur inquiétude face au problème de la violence des exactions sans donner de détails sur les faits qui leur sont connus :

Oui je suis de ton avis, il faudra donner des ordres très sévères pour rappeler à l’ordre tous les responsables à tous les échelons au sujet des exactions. La gravité de cette affaire ne doit pas t’échapper. Notre avenir en dépend.[15]

D’après les témoignages recueillis, et notamment celui du commandant Faddal (Si H’mimi), il existait des accords tacites entre l’ALN et les militaires français responsables des postes. Lorsque les populations n’étaient pas victimes d’actions de répression ou de violences, l’ALN laissait les militaires tranquilles. On retrouve ce phénomène dans une lettre de menace adressée à un capitaine en poste près de Bougie :

Donc Capitaine : un conseil à vous donner, il faut laisser les civils tranquilles [...]. Si vous laissé [sic] les civils ça va, sinon un jour viendra où : vous aussi je vous laisserai un souvenir. L’Algérie, vous la céderez, mieux pour vous de préserver votre tête et de rejoindre votre famille sain et sauf.[16]

Les tentatives de fraternisation sont rares mais elles ont existé ; certaines conduisant à des situations particulières qui nous sont livrées grâce aux témoignages. Les Algériens arrivaient souvent à faire la part des responsabilités. Ils en arrivent même, pour certains, à reconnaître l’innocence des appelés qui n’étaient pas volontaires mais victimes d’un système politique. Cette perception nous amène à prendre en considération les relations qui peuvent exister entre les combattants, notamment dans le cadre de la captivité.

Le cas des prisonniers

Les règles de la guerre

L’ALN déclare dans la plateforme de la Soummam que la guerre doit être menée dans le respect des conventions sur le traitement des ennemis. Elle recommande aux soldats musulmans le respect des lois de la guerre en référence aux accords de Genève de 1949[17] qui condamnent les exécutions sommaires, les tortures, les traitements humiliants ou dégradants et exige le traitement humain des civils, blessés ou prisonniers. Mais d’autres propos affirment que la révolution a obéi à une autre logique ; son seul critère d’action est la poursuite victorieuse du mouvement révolutionnaire. C’est pourquoi tous les moyens sont justifiés par l’action : « Conformément aux principes révolutionnaires, continuation de la lutte par tous les moyens jusqu’à la réalisation de notre but. »[18] Dans cette perspective, les traitements infligés à l’ennemi ne sont pas pris en compte, ils sont sans importance d’où l’absence de réglementations homogènes. D’autre part, dans ces communiqués, l’ALN mentionne que les combattants français qui sont arrêtés sont traités comme des prisonniers de guerre, contrairement aux combattants algériens qui « subissent des traitements dégradants »[19]. Pour atténuer ce contraste, le Croissant Rouge algérien, fondé en 1957 et présidé par monsieur Ben Bahmed, s’efforce de respecter les conventions internationales malgré les sévices de l’armée française ; il occupe d’ailleurs un rôle non négligeable dans le discrédit extérieur de l’armée française.

Les directives de l’ALN concernant le traitement des prisonniers sont divergentes et révèlent un manque d’unité dans le commandement. Étant donné sa mobilité, l’ALN ne dispose pas de structure carcérale organisée pouvant accueillir les prisonniers français.

Une « Instruction de juin-juillet 1955 », précise les intentions de l’ALN et les moyens prêts à être utilisés : « Les prisonniers français doivent être enfermés. Pour les prisonniers musulmans ; vous jugerez leur valeur. »[20]

Les directives générales du FLN en 1956 indiquent dans un chapitre consacré à l’action psychologique la conduite à tenir :

Prisonniers de guerre : le CP s’occupera des prisonniers de guerre au cas où il y en a. Les prisonniers de guerre seront bien logés, nourris et ils ne devront en aucun cas être maltraités. Les CP leur feront écrire des lettres à leur famille et à leurs amis. Les lettres ne devront en aucun cas être dictées, il est laissé au gré des prisonniers d’écrire ou non. Les prisonniers de guerre ayant une bonne conduite durant leur séjour peuvent être relâchés.[21]

Du côté de l’ALN, nul intérêt de faire des prisonniers de guerre. Il n’y a pas de réel intérêt stratégique militaire, simplement une utilité concernant la propagande internationale et d’obtenir des renseignements quelconques. Néanmoins, on note dans une directive de décembre 1958 que : « Il faut faire des prisonniers parmi les militaires et les personnalités civiles européennes. Ceux de la wilaya 4 seront dirigés sur la wilaya 3. »[22] L’un des objectifs dans l’utilisation des prisonniers français est de servir la propagande destinée à l’opinion publique internationale. Il s’agissait par exemple de l’utilisation des témoignages des appelés ayant séjourné au sein des rangs de l’ALN, témoignages envoyés à leurs proches ou publiés dans le journal El-Moudjahid.

Les prisonniers peuvent éventuellement être utilisés comme un moyen de chantage :

Il est très utile de faire, autant que faire se peut des prisonniers et par tracts informer la France et son armée que nous exécuterons des prisonniers chaque fois que des fidayines seront exécutés.[23]

Les prisonniers français peuvent servir de monnaie d’échange comme l’atteste une lettre d’un prisonnier français[24] envoyée à ses parents par l’intermédiaire de l’ALN et qui s’adresse également à eux :

Nous vous proposons d’échanger Bernard contre trois de nos prisonniers chez les colonialistes [...]. Nous avons proposé aux supérieurs de Bernard pour l’échanger nous sommes restés sans réponse. Pourquoi ?[25]

Dans une directive de l’ALN concernant l’organisation militaire de la wilaya 3 en 1957, on observe des mesures radicales :

Prenez soin des prisonniers européens de l’armée française, endoctrinez-les pour leur inculquer l’esprit de notre révolution. Vous leur présenterez des hommes qui les convaincront du point de vue culturel et politique. Vous veillerez à ce qu’ils soient soustraits aux regards des civils et des djounoud (sauf ceux commis à leur garde). Vous soumettrez ces derniers à un interrogatoire pour en tirer tous renseignements. Vous les ferez comparaître devant un tribunal militaire et vous les exécuterez.[26]

Pourtant, en ce qui concerne les prisonniers français, l’ALN dans sa propagande tente de diffuser une information sous forme de rumeurs en disant qu’elle a toujours pris soin des prisonniers.

Ainsi, les témoins interrogés nous font part de plusieurs histoires et anecdotes sur le dévouement d’Amirouche à l’égard des prisonniers. Celui-ci les aurait traités avec dignité allant même jusqu’à donner sa montre et de l’argent à un prisonnier français avant de le libérer. Les services de renseignement français qui réalisent une fiche en novembre 1958 d’après la déclaration d’un prisonnier français de souche européenne (FSE) libéré par l’ALN concernant le tempérament d’Amirouche[27] confirment ces récits :

Le commandement de la Wilaya III a laissé une forte impression sur les prisonniers. Le colonel AMIROUCHE est selon eux un personnage d’envergure, très dur, craint, respecté et admiré de ses subordonnés surtout des « petits ». On raconte sur lui, disent-ils, des tas d’anecdotes qui en font un personnage de légende ; ils peuvent quant à eux témoigner de ce qui suit :
- Le 1er novembre c’est AMIROUCHE [sic] en personne qui leur a préparé et servi le café.
- Au moment du départ, à l’un d’eux qui se plaignait de ce qu’on lui avait pris sa montre lors de sa capture, il a remis son propre bracelet-montre.
- Une nuit apercevant les prisonniers qui n’étaient pas couverts, il est entré dans une colère terrible et est allé lui-même arracher les couvertures des Officiers présents pour les leur donner.

Le témoignage du djoundi Mohand-Ouamar Touari confirme ces procédés lorsqu’il répond à la question concernant le traitement des prisonniers :

Les prisonniers français n’étaient pas maltraités, on les amenait à Akfadou. Ensuite on les relâchait sur les routes et on leur donnait de l’argent, on leur achetait des vêtements. Lorsqu’ils rentraient chez eux, ils parlaient d’une armée régulière de l’ALN. Ils avaient surtout peur d’être égorgés. Les harkis et les légionnaires étaient tués.[28]

Certains témoins avouent que les prisonniers sont rares et sont exécutés sommairement. D’après Belkacem Aït-Ahmed :

Ils étaient soit tuer, soit capturer et libérer par le colonel Amirouche. Ses ordres étaient de ne pas faire subir de mauvais traitement.[29]

Le sort réservé aux prisonniers français peut être différent dans les textes et dans la réalité puisque les directives ne sont pas toujours respectées. Celles-ci précisent bien que :

L’exécution des prisonniers de guerre est formellement interdite. Il devra être créé un service de prisonniers de guerre dans chaque zone. Ce service aura pour tâche de populariser la justesse de notre lutte.[30]

Dans une directive[31] datée du 11 mai 1958, signée par Amirouche et récupérée le 4 novembre 1959 à dix kilomètres au nord-est de Sidi Aïch, ce dernier prescrit la torture, le massacre et l’enterrement clandestin des captifs.

De son côté, la France adopte une conduite qui consiste à faire la guerre sans la reconnaître. Elle crée de ce fait un état de non-droit extrêmement préjudiciable au respect des civils et des prisonniers. L’état des prisonniers de guerre n’est pas reconnu même si certains captifs ont des treillis portant au dos l’inscription « PIM » (prisonnier interné militaire).

Comment établir la validité juridique des crimes commis, matériellement constatés, s’il n’y a pas de guerre officiellement reconnue ?

Les conditions de captivité des combattants de l’ALN permettent de comprendre leurs réactions violentes. Ils sont avertis des périls encourus par les prisonniers et sont exposés non seulement dans leur personne physique, mais aussi dans leurs convictions les plus intimes, du fait de procédés de véritable désintégration psychique mise au point par les techniques modernes.

Les combattants algériens savent qu’ils n’ont aucun droit face à leur adversaire même en tant que prisonniers. Un des aspects particuliers de la guerre psychologique qui n’est pas négligeable, est celui de l’action sur les prisonniers de guerre. Or, les opérations de maintien de l’ordre en Algérie ont conduit à créer des camps de regroupement et des centres de tri et de transit (CTT) où sont internés des prisonniers musulmans. D’après la direction des affaires politiques :

Si l’on excepte quelques irréductibles et les criminels qui doivent passer en jugement, il reste une masse qui comporte un bon nombre d’éléments « récupérables » : certains peuvent même devenir des agents efficaces de notre propagande.[32]

Les autorités militaires françaises ont conscience du peu de respect accordé aux prisonniers musulmans même en cas de décès. Les plaintes suscitées risquent d’influencer le comportement des combattants de l’ALN à l’égard des prisonniers français :

Enfin, le prisonnier attire l’attention sur notre peu de respect pour les fellaghas tués. Ceux-ci ne sont pas remis à une autorité religieuse et ne sont pas enterrés suivant les traditions. Il estime que cette façon de procéder a des incidences néfastes sur le comportement de certains musulmans qui nous étaient fidèles.[33]

L’ALN est particulièrement sensible à la manière dont l’adversaire traite les morts algériens. D’après Mohand-Ouamar Touari :

Ils [les militaires français], minaient parfois nos morts algériens. Par précaution, on les récupérait avec des cordes pour éviter le piège.[34]

Le style de guerre menée oblige les combattants de l’ALN à réaliser des opérations chocs où la probabilité de faire des prisonniers est faible. De surcroît, l’ALN n’a pas les moyens et les structures logistiques pour se permettre de faire des prisonniers. Tuer l’adversaire est l’objectif même des opérations en vue de lui prendre un maximum de matériel de guerre. Même si l’acte de tuer l’adversaire est légitimé par de nombreuses raisons, inconsciemment, les combattants ne peuvent se sentir complètement innocents. La priorité est souvent la cause de la lutte qui justifie la destruction de l’adversaire. La légitimité qu’ils accordent au conflit leur confère la possibilité de se décharger de toute responsabilité d’homicide à l’égard de leur adversaire. Ils assument entièrement la responsabilité de leurs actes, car dans la majorité des cas, ils se sont engagés volontairement dans les rangs de l’ALN[35].

Lorsque les prisonniers français sont libérés par l’ALN, celle-ci fait en sorte qu’ils soient présentables. Ainsi, elle leur fournit du savon, des vêtements et des chaussures. Les prisonniers français en captivité sur le territoire algérien peuvent être abandonnés sur une route par le FLN et récupérés par une unité française qui a été prévenue. Ceux qui ont été incarcérés à Oujda, au Maroc, sont conduits au Croissant Rouge à Rabat. Le Maroc et la Tunisie, indépendants, offrent à l’ALN des bases de repli où elle se repose, se ravitaille et éventuellement garde les prisonniers. D’après le témoignage de Belkecem Taguelmint, les prisonniers français étaient ramenés en Tunisie et la Croix-Rouge les rapatriait en France.

Les prisonniers français du FLN font parti des oubliés de la guerre d’Algérie, il en est de même pour les disparus[36]. Après la guerre aucune instance officielle n’a accordé d’intérêt au sort de ces hommes. Le silence des appelés après la guerre fut éloquent, celui des prisonniers libérés l’était encore plus. Aucune étude n’a été menée sur les conditions de détentions des prisonniers de l’ALN. La lecture des journaux de marche et d’opérations ne laisse pas apparaître les réactions humaines au moment des affrontements.

Conclusion

Pour ne reprendre qu’un exemple de la complexité des rapports entre les deux camps, du côté français, on avait en face de soi, non des combattants, mais des « rebelles » qu’il fallait punir ou au mieux des Français égarés qu’il fallait remettre dans le droit chemin. Du côté algérien, on avait en face de soi des soldats qui combattaient au sein d’une armée coloniale dans une guerre illégitime et contraire aux idéaux républicains. Ce paradoxe initial, cette non-reconnaissance de l’autre pour ce qu’il est réellement, furent le fil rouge.

Les troupes françaises envoyées en Algérie pour faire du maintien de l’ordre puis assurer la « pacification » constituent avant tout pour l’ALN une armée chargée d’imposer l’ordre colonial. Dès le début, l’ALN, composée de combattants armés mais aussi de militants nationalistes non armés, n’est pas reconnue par l’adversaire. Les noms employés par les autorités militaires et civiles françaises rappellent que l’ennemi n’est pas reconnu, même s’il est implicitement désigné. De son côté, l’ALN ne cesse d’invoquer sa légitimité et sa volonté d’acquérir une certaine dignité pour les masses qu’elle représente. C’est d’ailleurs de la population que dépend l’issue de l’affrontement. Dans ce contexte, l’image de l’autre correspond à des représentations traditionnelles depuis la conquête de l’Algérie. L’ALN manifeste une différence symbolique entre colonisateurs et colonisés lorsqu’elle se valorise en évoquant sa résistance morale et physique face à l’occupant.

L’image de l’autre n’est pas seulement une représentation, elle permet de faire entendre le message de l’ALN, ses réclamations. Sa principale revendication envers son ennemi est d’ordre politique. La perception de l’adversaire est donc liée à la manière dont la guerre est pensée et menée.

L’ALN a construit et justifié son image du combattant français à travers une propagande particulièrement adaptée et produite dans un contexte de violence extrême. Cette image est largement liée à une certaine vision du monde et de la guerre vue par ceux qui cherchent la reconnaissance de l’opinion internationale. Dans cette perspective, le combattant français représente une image de la France, remise en cause à l’instar de la raison d’État.

L’ALN s’inspire et reproduit dans sa représentation de l’adversaire, l’image du rapport de domination coloniale. Ainsi l’armée française apparaît surtout comme une force de répression au service de la colonisation. Cette force est décidée à employer tous les moyens : bombardements aériens des villages, tortures, camps d’internement et saccage des denrées alimentaires. La violence de l’armée française est bien une des raisons fondamentales de l’engagement des civils envers l’ALN. Celle-ci revient souvent sur l’attitude des combattants ennemis mais rarement sur les sentiments que ceux-ci lui inspirent. Selon l’ALN, les actions des combattants français n’ont pas pour effet d’éteindre l’insurrection mais au contraire de la développer.

Le face à face des combattants révèle plusieurs types de conflictualités. La construction de l’altérité est la manifestation tangible des conceptions politiques, sociales et militaires de cette époque. Si les comportements humains peuvent être les mêmes de part et d’autre, les raisons d’agir sont différentes. L’image de l’autre est aussi le reflet de sa propre identité et des particularismes de l’armée à laquelle il appartient.


[1] Tract ALN « Soldat de l’armée française », trouvé dans la région de Constantine en mai 1955. Archives de Vincennes (AV), Service historique de l’armée de terre (SHAT, désormais Service historique de la Défense), 1H 2587.

[2] Tract ALN-FLN « Toi qui œuvres contre ta conscience ! Jeune Français ! », trouvé le 22 juin 1958 à Rhouffi par des militaires et des enfants. AV, SHAT, 1H 2588/3.

[3] Tract ALN de la wilaya 5, zone 1, sans date. AV, SHAT, 1H 2588/2.

[4] Tract ALN de la wilaya 5, zone 1, sans date. AV, SHAT, 1H 2588/2.

[5] Tract ALN « Appel aux soldats de l’Armée Française - Jeunes soldats de France », trouvé aux abords du cantonnement de Zoui, le 2 novembre 1955. Deuxième exemplaire adressé à l’instituteur de l’école de Blandan. AV, SHAT, 1H 2587/1.

[6] Tract ALN « La quille », découvert entre Tiskert et Mechamich, le 7 juin 1958. AV, SHAT, 1H 2588/2.

[7] Claire Mauss-Copeaux, Appelés en Algérie. La parole confisquée. Paris : Hachette, 1999, p. 108.

[8] Tract ALN « Pauvre France », trouvé sur les lieux du sabotage de la voie ferrée Constantine-Biskra, le 17 juillet 1956. AV, SHAT, 1H 2587/1.

[9] Tract ALN « Soldats Français », découvert le 29 mai 1958 en deux endroits : Ymmoula et Ighzer Amokrane dans la région de Sidi Aïch, zone Ouest-Constantinois. A été remis à un militaire à Sidi Moussa le 1er mai 1958. AV, SHAT, 1H 2588/2.

[10] Tract ALN, sans titre concernant le ministre de l’Algérie, découvert par la brigade de gendarmerie de Médéa, le 9 mai 1958, collé à un arbre, en bordure de la route nationale 18. Découvert à environ un kilomètre à l’ouest de Médéa et à une trentaine de mètres du lieu où venait d’être commis l’attentat dont a été victime monsieur Hamaddou Mouloud, vice-président de la délégation spéciale de la commune de Lodi. « Bleu » est un mot à double sens. Il signifie : jeune soldat inexpérimenté et symbolise aussi le tabac fumé par la troupe (paquet de « Gauloises bleues »).

[11] Directives spéciales du comité de la wilaya 3, zone 3, signées par le colonel Amirouche et adressées aux armées le 16 mai 1958. AV, SHAT, 1H2586/2.

[12] Bulletin de renseignement : circulaire de la wilaya 5, zone 4. AV, SHAT, 1H 1611.

[13] Voir La biographie d’Abderrahmane Mira dans Benjamin Stora, Dictionnaire biographique de militants nationalistes algériens. Paris : L’Harmattan, 1985, p 114-115.

[14] Tract ALN, conseils militaires et civiques. Document saisi sur les « rebelles » aux environs de Tazmalt le 23 juillet 1956. AV, SHAT, 1H 1609/2.

[15] Lettre datée du 12 avril 1956 d’Amal Ouamrane, premier adjoint (surnommé « Si Arezki » ou « Reski ») adressée à Krim Belkacem (surnommé « Si Omar ») et saisie dans les archives de ce dernier à Tazmalt le 23 juillet 1956. AV, SHAT, 1H 1609/2.

[16] Lettre de menace adressée à Monsieur le capitaine d’Ighil N’Tala (secteur de Bougie). Document rebelle récupéré sur la mosquée d’Ighil N’Tala, dans la nuit du 11 au 12 novembre 1956, transmis par le secteur de Bougie en date du 22 novembre 1956. AV, SHAT, 1H 2587/1.

[17] Jean Siotis, Le droit de la guerre et les conflits armés d’un caractère non international.Paris : Librairie générale de droit et de jurisprudence, 1958, p. 206.

[18] Proclamation du 1er novembre 1954.

[19] El-Moudjahid, 15 décembre 1957, n° 14.

[20] Ibid.

[21] Directives générales du 30 novembre 1956, document récupéré en février 1957 par le bureau psychologique de la 10e région militaire. AV, SHAT, 1H 2586/2.

[22] Procès-verbal de la réunion interwilaya 1, 3, 4 et 6, tenue quelque part en wilaya 2, du 6 décembre 1958 au 12 décembre 1958. AV, SHAT, 1H 1700.

[23] Circulaire n° 4, wilaya 4, septembre 1957. AV, SHAT, 1H 1611.

[24] Il s’agit du lieutenant Bernard Louis de la compagnie méhariste de l’Erg oriental, né le 24 novembre 1929 à Charbonnière (Rhône). Disparu le 18 novembre 1955 au cours d’une embuscade tendue par l’ALN sur la route de Seiar (Constantinois). Dossiers de militaires disparus. Archives du musée de l’Armée d’Alger.

[25] Extrait de la lettre adressée le 25 novembre 1955 à monsieur Louis (père du disparu) par l’ALN qui assure que le lieutenant est prisonnier et bien traité. Dossiers de militaires disparus. Archives du musée de l’Armée d’Alger.

[26] « Rapport Spécial militaire ». AV, SHAT, 1H 1700.

[27] Fiche de renseignement, II/TEMPÉRAMENT (déclaration des prisonniers FSE libérés par l’ALN début novembre 1958-BR-n° 2497/ZEA/E du 5 novembre 1958). AV, SHAT, 1H 1700.

[28] Témoignage de Mohand-Ouamar Touari (wilaya 3, zone 2, région 3, secteur 4) recueilli en octobre 2001.

[29] Témoignage de Belkacem Aït-Ahmed recueilli le 18 novembre 2001 par l’auteur.

[30] « Directives générales ». Document récupéré le 7 septembre 1957 par un élément de la Zone sud-algéroise (ZSA) au cours d’un accrochage qui a eu lieu à vingt kilomètres au sud de Bouira. Ce document a été adressé au Corps d’armée de Constantine (CAC) par le Corps d’armée d’Alger (CAA). AV, SHAT, 1H 1611.

[31] Directive d’Amirouche. AV, SHAT, 1H 1700/2.

[32] « Plan d’action psychologique sur les prisonniers », daté de juillet 1956, réalisé par le général de corps d’armée Lorillot, commandant la 10e région militaire et adressé à Monsieur le ministre résidant en Algérie. AV, SHAT, 1H 2573.

[33] Note réalisée par le 5e bureau concernant les « Méthodes de guerre psychologique des rebelles algériens » (renseignements fournis par un chef rebelle fait prisonnier), en date du 30 octobre 1956. Note réalisée par le général de corps d’armée Baillif, commandant interarmes, commandant supérieur des troupes de Tunisie. Destinataire : le ministre de la Défense nationale et des Forces armées, le secrétaire d’État aux forces armées « Terre ». AV, SHAT, 1H 2586.

[34] Témoignage de Mohand-Ouamar Touari, djoundi et artificier de 1958 à 1960 (voir note 28).

[35] Il est vrai que l’ALN pouvait recruter par la terreur comme nous l’indique un témoin qui a reçu des menaces.

[36] Les disparus concernent les militaires pendant la guerre, mais également l’enlèvement de civils et de militaires après le 19 mars 1962. Même si les familles ont réclamé l’ouverture d’enquêtes, les autorités françaises ont refusé ; l’entrave des accords d’Évian et les relations secrètes avec le FLN expliquent peut-être cette non-intervention. « Le bilan est de 485 militaires français disparus, 875 civils français avant le 19 mars, auxquels s’ajoutent 2 000 disparus, après le cessez-le-feu ». Chiffres cités par Jacques Frémeaux (André Corvisier [dir.], Histoire militaire de la France. T. IV: De 1940 à nos jours. Paris, PUF, 1997, p. 347.


Citer cet article :
Dalila Aït El Djoudi, « L’Armée de libération nationale face à l’armée française », colloque Pour une histoire critique et citoyenne. Le cas de l’histoire franco-algérienne, 20-22 juin 2006, Lyon, ENS LSH, 2007, http://ens-web3.ens-lsh.fr/colloques/france-algerie/communication.php3?id_article=278